Cancer de l'œsophage
1. Qu'est-ce que le cancer de l'œsophage ?
2. Est-il fréquent ?
3. Quels sont les facteurs favorisants ?
4. Quels sont les symptômes ?
5. Comment fait-on le diagnostic ?
6. Quel bilan doit-on faire ?
7. Quel est le traitement ?
8. Quel est le pronostic ?
1. Qu'est-ce que le cancer de l'œsophage ?
C'est une tumeur maligne qui comporte deux types principaux (selon l'étude au microscope) :
Cancer épidermoïde
Son aspect rappelle la muqueuse normale de l'œsophage. Il représente trois quart des cas.
Adénocarcinome
Son aspect rappelle une muqueuse proche de celle de l'estomac et de l'intestin. Il survient souvent sur une modification du revêtement de la partie basse de l'œsophage : une métaplasie glandulaire intestinale, appelée endo-brachy œsophage (EBO) ou « muqueuse de Barrett ».
Autres tumeurs
Il existe d'autres tumeurs de l'œsophage beaucoup plus rares:malignes (sarcome, mélanome) ou bénignes (léiomyome).
2. Est-il fréquent ?
C'est le 3ème cancer digestif en France (derrière le cancer colorectal et le cancer de l'estomac).
Il est plus fréquent chez l'homme que chez la femme. Le cancer épidermoïde de l'œsophage est favorisé par la consommation d'alcool et de tabac.
Sa fréquence est particulièrement élevée dans le département du Calvados (30 pour 100 000 chez l'homme et 1 pour 100 000 chez la femme).
3. Quels sont les facteurs favorisants ?
Cancer épidermoïde
Le risque est très nettement augmenté en cas de consommation exagérée d'alcool et chez les fumeurs.
Adénocarcinome
Le risque est augmenté en cas de muqueuse de Barrett . La muqueuse de Barrett est une complication possible du reflux gastro-œsophagien (RGO), qui nécessite une surveillance particulière et régulière par endoscopie, du fait du risque accru de cancer.
4. Quels sont les symptômes ?
Dysphagie
C'est le signe majeur. C'est une sensation de blocage ou de gêne au passage des aliments après la déglutition, ressentie dans la poitrine derrière le sternum. Elle est surtout présente avec les aliments solides. Elle traduit le rétrécissement (sténose) de la lumière de l'œsophage secondaire à la tumeur.
Autres signes
Amaigrissement, régurgitations, anémie avec saignements digestifs, anorexie (perte d'appétit), hypersialorrhée (excès de salive dans la bouche).
5. Comment fait-on le diagnostic ?
Endoscopie (EOGD)
C'est l'examen clé. Elle peut être faite après une anesthésie locale de la gorge ou sous anesthésie générale. L'aspect est celui d'une tumeur, bourgeon obstruant la lumière et entrainant un rétrécissement (sténose). Les biopsies permettent, si elles sont positives, d'affirmer le diagnostic de cancer et de préciser son type (cancer épidermoïde ou adénocarcinome).
Autres examens
La radiographie (transit baryté oeso-gastro-duodénal, TOGD) est moins performante que l'endoscopie. Elle est parfois utilisée dans le bilan avant traitement.
6. Quel bilan doit-on faire ?
C'est un bilan destiné à déterminer l'extension de la tumeur et éventuellement son opérabilité. Il comprend les 2 volets suivants.
1°) Evaluation de l'état général
- des comorbidités (autres maladies) ;
- de l'état général par une classification dite classification de l'OMS ;
- de l'état nutritionnel (par des dosages dans le sang...) ;
- de l'état respiratoire ;
- bilan cardiaque.
2°) Bilan d'extension de la tumeur (de résécabilité)
Il évalue l'extension de la tumeur :
- au niveau de l'œsophage (profondeur à travers la paroi, atteinte des ganglions ;
- à distance : recherche de localisations secondaires (métastases) au niveau du foie (hépatiques) et du poumon notamment.
Il peut comprendre les examens suivants :
Scanner thoraco-abdominal
Cet examen tomodensitométrique évalue notamment l'extension en profondeur, vers le médiastin et l'arbre respiratoire (trachéo-bronchique) et peut détecter des métastases hépatiques ou pulmonaires
Echo-endoscopie
Elle est un peu plus performante que le scanner mais elle nécessite généralement une anesthésie générale et peut être incomplète en cas de sténose serrée. Elle est importante lorsqu'on envisage un traitement endoscopique (cancer superficiel)
Transit baryté de l'œsophage
Il précise bien le siège et la longueur d'une tumeur
Autres examens :
- Il peut s'agir d'un examen ORL ou d'une bronchoscopie pour rechercher un cancer associé (notamment ORL) et/ou évaluer le retentissement du cancer de l'œsophage (paralysie laryngée par atteinte d'un nerf dans le médiastin au contact de la tumeur oesophagienne, fistule entre l'œsophage et le tractus respiratoire).
- Une scintigraphie osseuse ou un scanner cérébral seront réalisés s'il existe des signes faisant craindre une métastase à ce niveau.
- Pet-scan (tomographie par émission de positons). C'est un examen intéressant pour la recherche de métastases à distance, en particulier lorsqu'on envisage une résection chirurgicale.
7. Quel est le traitement ?
Différentes modalités thérapeutiques peuvent être envisagées, parfois de façon combinée (radio-chimiothérapie) ou successive. Chaque cas est discuté en réunion de concertation multidisciplinaire (RCP) qui associe notamment gastroentérologue, chirurgien, radiologue et cancérologue. Les propositions thérapeutiques dépendront des résultats des bilans d'opérabilité et de résécabilité.
1°) Chirurgie
Plusieurs techniques sont possibles, les plus utilisées sont les suivantes :
• Œsophagectomie transthoracique subtotale avec curage ganglionnaire et plastie gastrique (l'estomac est monté à l'intérieur du thorax pour remplacer l'œsophage thoracique qui a été enlevé) . Cette intervention se déroule par deux voies d'abord abdominale ( qui peut se faire sous cœlioscopie ) et thoracique droite (Intervention de Lewis Santi)
• Œsophagectomie sans thoracotomie (sans ouvrir le thorax) en cas de problème respiratoire. Cette intervention se réalise par une double voie d'abord abdominale et cervicale gauche (à thorax fermé)
• Œsophagectomie par une triple voie d'abord abdominale, thoracique droite et cervicale gauche ( Intervention de Akayama ). Cette chirurgie est réservée pour les tumeurs de l'œsophage thoracique situés à la partie haute du médiastin.
2°) Radiothérapie
La radio-chimiothérapie concomitante s'adresse aux cancers non opérables ou non résécables et n'ayant pas de métastases à distance. Les résultats sont comparables à ceux de la chirurgie. Si nécessaire, un traitement chirurgical complémentaire est parfois discuté.
3°) Chimiothérapie palliative
Elle est recommandée en cas de métastases chez des sujets en bon état général
4°) Endocopie
A visée curative
Elle s'adresse à des cancers superficiels (après examen par échoendoscopie).
La résection muqueuse est alors le traitement de choix, car il permet un examen histologique (au microscope) de la pièce de résection, contrairement aux autres méthodes (laser, photothérapie dynamique, curiethérapie).
A visée palliative
Il s'agit de méthodes destinées à lutter contre la dysphagie et à rétablir la possibilité d'un passage des aliments (et de la salive) à travers l'œsophage vers l'estomac : dilatation, prothèses (en particulier en cas de fistule bronchique), destruction tumorale (laser, coagulation...).
8. Quel est le pronostic ?
Il dépend de plusieurs facteurs et surtout de l'extension de la tumeur localement et à distance, et du traitement que l'on a proposé.
En l'absence de traitement curatif, le taux de survie du cancer de on œsophage est inférieur à 3 % à cinq ans.
Bons à savoir
Œsophage
Bénéfices et risques de l'opération :
Ce n'est qu'au terme d'un bilan complet qu'une intervention est proposée.
Le risque vital est clairement engagé. L'intervention d'ablation de l'œsophage est une intervention lourde, grevée d'un taux de complications élevé. La mortalité postopératoire (dans les 30 jours) est de 5 à 8 %.
Le taux de complications est élevé en raison de la double voie d'abord abdominale et thoracique. Il s'agit avant tout de complications pulmonaires (troubles de la ventilation, surinfection, épanchement pleural) qui représentent environ 30 % des cas. Ces complications peuvent nécessiter une ventilation artificielle prolongée. Les complications infectieuses générales sont dominées par la désunion de la suture entre œsophage et estomac, responsable de fistules (18 % des cas) et d'infection locale puis générale. Une réintervention est souvent nécessaire dans ce cas.
Les complications générales comprennent également les infections sur cathéter central et sonde urinaire, heureusement beaucoup plus rares.
Le saignement est possible à la fois pendant et après l'intervention ; c'est une complication assez peu fréquente mais qui peut éventuellement nécessiter une transfusion sanguine voire une réintervention. Ce saignement peut être lié à une lésion de la rate survenant lors de la dissection de la partie haute de l'estomac. Au total, on estime qu'environ un tiers des patients opérés fera une complication au décours de l'intervention. La survenue d'une complication grave peut impliquer une nouvelle intervention et éventuellement un transfert en milieu de réanimation.